[Linux] HS théologique (ça dérive de : Re: De la liberté des oeuvres (ex:Re: bilan des installations et compte-rendu))

[Christophe Courtois]

Le 19/12/13 04:42, Serge Schmitt a écrit :
> Une de mes croyances - on est obligé d'en avoir rien que pour pouvoir
> utiliser le langage, alors autant en être conscient - cette croyance
> donc c'est que c'est bien la foi qui sauve mais que ça n'a rien à
> voir, mais alors rien du tout, avec la démiurgie ! J'ai la foi en
> certaines valeurs mais en aucun phénomène surnaturel. C'est ça que
> veut dire quand je m'amuse à provoquer certains auditoires en leur
> affirmant : "Je suis un athée radical qui a plus de foi que la plupart
> des croyants".

J'abonde.
Point de vue athéisme je suis moins radical : on ne peut prouver 
l'existence d'un Dieu omnipotent omniscient qui aurait décidé de ne plus 
intervenir dans le monde physique... ni son inexistence. Mais en science 
la charge de la preuve incombe à celui qui prône l'existence d'un objet 
quelconque. Il est totalement impossible de mélanger science et Dieu, 
sinon celui-ci disparaît sous le rouleau compresseur : Credo quia 
absurdum. Ou le Dieu des manques, de plus en plus restreint et pas 
spécialement enthousiasmant.

Quant à la "foi" pour des mécréants comme nous, je préfère le terme 
moins connoté (mais moins provocateur :-) des options philosophiques : 
la science ne peut PROUVER que tous les hommes sont égaux (il y en a des 
plus forts, des plus intelligents, ou adaptés en fonction du cadre), que 
l'esclavage ne peut exister, que les femmes doivent être les égales des 
hommes ou l'inverse : ce sont des choix majeurs de société que nous 
estimons justes en soi, et qui peuvent valoir la peine de prendre les armes.

> On peut toujours me rétorquer qu'alors pour moi dieu, au sens de ce
> par quoi nous sommes irrémédiablement dirigés, c'est la culture,
> auquel cas j'applaudis de toutes mes mains libres.

Je compare aussi au Père Noël. Personne ne l'a jamais vu et pourtant les 
enfants ont des cadeaux. Il est juste (imparfaitement) distribué, c'est 
le grand secret.

 > Développer ça devrait se faire sur une autre liste.

Oui. Ça existe encore bruit ? Tout le monde est abonné ?

> Ce qui est séduisant en informatique c'est que même s'il y existe des
> contraintes matérielles, les possibilités sont immensément vastes dans
> des domaines immensément nombreux. Avec comme l'a fait remarquer
> Christophe dans le cas général des risques limités pour la sécurité
> des personnes. L'on peut donc y prendre du plaisir à se croire un peu
> démiurge. C'est quasiment l'équivalent d'un terrain de jeu ou
> d'aventure. C'est un plaisir qu'on a le droit de ne pas se refuser.

Qui n'a jamais joué à Sim City, Populous ou un jeu du même acabit n'a 
aucun sens du divin.

> D'un autre côté il y a le succès des mondes virtuels auquel la théorie
> du chaos et la difficulté de plus en plus grande de croire aux
> propositions créativistes ne pas étrangers.

Phrase pas finie mais ça avait l'air bien.

> Ce qui me fait vraiment peur c'est cette réalité là : quand l'ensemble
> de la communication politique et économique aura viré au storytelling
> généralisé (à l'instar de ce que font les religions depuis des
> millénaires mais pas seulement elles), storytelling au pouvoir de
> conviction quasi absolu grâce justement à la puissance des systèmes
> d'information, je pense qu'il deviendra difficile de se situer et donc
> de penser à lutter pour se libérer. Ma foi en la culture et ma vision
> de la nature humaine font que je pense qu'il y aura toujours des
> révoltés et des portes de sorties mais comme d'hab, il y aura beaucoup
> de sang et de larmes.

The plural of anecdote is not data, comme on dit dans les cercles 
sceptiques face à ceux qui clament que telle médecine alternative 
fumeuse fonctionne. Une belle histoire ne peut masquer la réalité de 
millions de personnes. Je sais bien que notre société a le QI d'un gamin 
de 4 ans qui croit encore aux contes de fées, mais on peut espérer 
qu'elle grandira.

> C'est ici que les concepts d'informatique libre et surtout de formats
> ouverts acquièrent une immense portée philosophique et politique dont
> peut grandement dépendre l'avenir de l'Humanité.

Par définition, seuls les formats ouverts résistent au temps, les 
formats fermés ne pouvant être récupérés après un certain temps.

Ce qui d'ailleurs est inquiétant avec la (relative) vague actuelle de 
cryptage après les révélations sur l'espionnage généralisé 
institutionnel : si nous cryptons tous nos disques, la moindre erreur 
dans la chaîne de transmission des clés en condamne le contenu. Je peux 
fouiller dans des archives familiales centenaires, mais si je disparais 
demain, une partie de la mémoire familiale sur le serveur de la maison 
peut disparaître du jour au lendemain.


-- 
Christophe Courtois
http://www.courtois.cc/